Bonjour
Résumé du film
Un quartier de la banlieue de Tokyo : six jours de la vie de quelques familles dans des petites maisons proches et semblables. Deux commères soupçonnent Mme Haraguchi, la présidente de l’Association des femmes – qui elle-même soupçonne Mme Hayashi sa trésorière –, d’avoir détourné l’argent des cotisations pour s’acheter un lave-linge.
Sur le chemin de l’école, leurs enfants jouent à devenir pétomanes, regardent le sumo sur le téléviseur des voisins – un jeune couple « moderne » – plutôt que d’apprendre leur leçon d’anglais, et Minoru et Isamu, les deux garçons de Mme Hayashi, réclament une télévision. Setsuko, la soeur cadette de Mme Hayashi, confie au beau professeur d’anglais au chômage des traductions professionnelles.
La présidente se rend chez sa trésorière et l’accuse à mi-mot de mentir, avant de découvrir que sa propre mère, une femme âgée, avait omis de lui remettre les fameuses cotisations. Elle retourne s’excuser, l’incident paraît clos.
Un soir, Minoru, l’aîné, défie l’autorité de son père en réclamant une TV et en critiquant ouvertement l’hypocrisie des échanges quotidiens entre adultes. Il décrète, suivi par son frère, une grève illimitée de la parole. Le lendemain matin, ils ne disent même pas « bonjour » à Mme Haraguchi, persuadée d’être victime de l’affaire des cotisations, et gardent le silence à l’école.
Le dimanche, le couple « moderne » prépare son déménagement, quand le professeur d’école de Minoru vient frapper à la porte. Les enfants en profitent pour fuguer. Le soir venu, c’est le professeur d’anglais qui les retrouve et les ramène à domicile. Et dans le couloir : un grand carton contenant une télévision. Minoru et Isamu cessent leur grève sur le champ et, le lendemain matin, adressent un grand « bonjour » à Mme Haraguchi qui, décidément, n’y comprend plus rien.
Sur le chemin de l’école, les enfants jouent encore, avec plus ou moins de succès, à devenir de grands pétomanes.
Sur le quai, en attendant le train, Setsuko et le professeur d’anglais se rapprochent et parlent du temps qu’il fait.
Pourquoi ce film a été choisi
Par Agnès Chesné
Coordinatrice Education nationale École et cinéma en Essonne.
Sur l’affiche, deux enfants droits comme des i, nous toisent d’un regard hautain voire méprisant. L’image est rythmée par des verticales et des horizontales qui s’entrecroisent ou se juxtaposent (jusque dans la rayure du pull des enfants). La caméra, placée très bas, filme en légère contre-plongée. Ozu utilise son « plan tatami ». Il place la caméra quasiment à hauteur du sol sur lequel les japonais s’assoient.
Avec cette image, Ozu résume le sujet de son film : une question de point de vue, un rapport d’opposition qu’il traite par une étude méticuleuse des détails de la vie et une construction minutieuse des composantes de l’image.
La musique de Bonjour évoque les films de Jacques Tati qui comme Ozu présente des critiques douces-amères de son époque.
L’action se situe dans le japon de l’après-guerre, en pleine mutation culturelle. Les modes de vie des familles tantôt traditionnelles, tantôt occidentalisées s’opposent par leur habitat, leurs vêtements, leurs aspirations. Le village de petites maisons de bois s’oppose aux verticales des tours de béton et les kimono des femmes d’intérieur aux jupes crayons des femmes actives. Un des personnages secondaires, une grand-mère ancienne sage-femme, moderne malgré son âge avancé, porte un pull à col roulé sous son kimono comme un trait d’union entre deux cultures.
Le monde de l’enfance s’oppose au monde des adultes. Les adultes sont coincés dans leurs traditions ou leurs responsabilités. Les enfants veulent vivre dans leur temps, ils veulent accéder au monde moderne et avoir la télé malgré le refus de leurs parents. Ils veulent vivre pleinement leur vie en s’adonnant à leurs jeux préférés comme dans la scène des pets à la fois comique et triste puisque ce jeu n’est pas toujours sans conséquence. La logorrhée de paroles insignifiantes des adultes s’oppose au mutisme déterminé des enfants qui se moquent de ces mots qu’ils trouvent inutiles comme « Salut, bonjour, bonsoir, il fait beau, non, oui, c’est vrai, là-bas, quel beau temps, ah bon… ».
Bonjour est un film ciselé où rien n’est laissé au hasard, tendre, drôle ou froidement réaliste. Le cheminement que Ozu propose au spectateur est très progressif. Il amène à une prise de conscience de l’importance des petits riens qui font notre quotidien. Mais il soulève aussi des questions plus graves. Ce film continuera longtemps à trotter dans la tête du spectateur sur un petit air de musique légère.
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